AUTO-INTERVIEW (ou comment en arrive-t-on à faire ce que l'on fait)
Comment vous est venu le besoin de peindre?
JPB: Grace à un ami de post adolescence qui a débarqué un jour chez moi, sa toile, ses pinceaux, le beau chevalet de bois qu'on venait de lui offrir sur le dos, avec l'intention de peindre la Chapelle N.D. D'Aubune à BEAUMES DE VENISE près de laquelle j'habitais alors. Cette passion qu'il m'a soudain révélée ne m'a plus quitté depuis.
Comment cette révélation?
JPB: Parce que j'ai très vite compris que c'était là un admirable moyen d'expression. J'avais à l'époque (68/69) des difficultés à ce niveau. La disparition de ma mère m'avais fortement affecté à un moment où peut être j'avais le plus besoin d'elle. Je m'étais replié complètement sur moi même ne sachant comment et à qui exprimer mon désarroi. Dés cet instant j'ai commencé, eu besoin de transcrire tous mes sentiments, surtout mes peines et mes tourments (mais n'est ce pas le propre de l'adolescence?) dans des poèmes et des chansons.
Vous étes musicien?
JPB: Non mais je le suis devenu. La musique faisait partie de mon environnement (certainement mes origines italiennes). Elle m'a toujours semblé et me semble encore le meilleur, le plus profond moyen d'expression. Cela fait tant de bien quand on a 16/18 ans d'avoir une guitare, comme une amie, à qui tout confier. Pour en revenir à la peinture, très vite j'en ai saisi la puissance, très vite j'ai compris qu'elle pouvait aller bien au delà des mots, toujours limités et beaucoup moins spontanés que le geste.
Mais surtout, elle permet de s'exprimer de façon moins visible et moins compréhensible pour l'entourage immédiat, ce qui à l'époque me semblait essentiel.
C'est pourquoi vous étes devenu très vite abstrait?
JPB: il est vrai que ce besoin de m'extérioriser m'a très vite amené à l'abstraction sans que rien d'ailleurs m'y prédispose. Je ne comprenais pas d'ailleurs à l'époque que l'on puisse faire autre chose en peinture que de copier ou interpréter la nature et j'ai tout naturellement commencé à travailler d'après nature, celle dont j'étais complètement entouré. Je ne fréquentais pas alors les musées ou les expositions (bien rares en province) et j'avais bien quelques livres de vulgarisation sur l'art mais, comme c'est hélas toujours le cas aujourd'hui, ils n'allaient guère au delà de l'Impressionnisme et au mieux du Cubisme comme si rien n'existait après.
Il est vrai également qu'entre l'arrêt sur le temps qu'est l'art figuratif et la vaste ouverture sur l'avenir qu'est l'art abstrait, j'ai très vite choisi. l'artiste à chacun de ses tableaux se crée un nouvel espace dans lequel va se structurer sa vie intérieure et, avec l'abstrait, cet espace est infini. Avec l'abstrait se sont ouvertes les limites de l'existance et celles de la perception. C'est le rôle de l'artiste je crois, de créer ces formes et ces couleurs qui changeront peut être ou amélioreront certainement notre vue du monde et notre vision intérieure comme autant de "fenêtres" s'ouvrant sur l'infini. Plus se créeront de nouveaux espaces et plus nous y gagnerons en liberté.
Un de vos grands inspirateurs semble avoir été l'AMOUR que l'on retrouve également tout au long de vos poèmes et chansons.
J.P.B: oui l'amour et la sexualité. Je suis natif du signe du SCORPION et chez lui cet instinct sexuel est, parait-il, profondément créateur. Il guiderait toute sa vie, c'est pourquoi certainement on le retrouve à tous les niveaux dans mes chansons, mes peintures et mes sculptures. C'est du moins les conclusions auxquelles m'ont amené les recherches que j'ai faites sur moi même.
La fracture entre figuratif et abstrait s'est produite en 1971 et s'est traduite par les cassures et les déchirures. Comment en étes vous arrivé à cela?
JPB:Pratiquement les déchirures sont la conséquense d'une longue nuit de sommeil et de fièvre créatrice comme il en existe malheureusement peu souvent. Je m'imaginais avec des pelotes de laine que je déroulais en mille fils multicolores et que j'assemblais et collais en un feu d'artifice sur mon tableau.
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